Square Leibniz (XVIIIe). Comme ici dans plusieurs logements
de ce square du nord de Paris, l'AP-HP commence à mettre en oeuvre sa décision
de récupérer des logements pour les personnels actifs de l’AP-HP. (LP/E.S.)
Élodie Soulié
Paris VRetraitéLogementAP-HP
Dans trois semaines, peut-être sera-t-elle à la rue. Pas
assez prioritaire pour obtenir un logement social, mais désormais indésirable
dans le parc privé de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Marie* a
pris sa retraite il y a quelques mois, après 33 ans de carrière à l’AP-HP, dont
elle occupe depuis 30 ans l’un des logements dédiés aux fonctionnaires actifs
de l’institution, répartis dans tous les quartiers de Paris. Des logements que
l’AP-HP a décidé, l’année dernière, de recenser et de récupérer autant que
possible pour y loger ses personnels réellement en activité et non par des
retraités ou même leurs proches. Il y a un an, le directeur général de l’AP-HP,
Martin Hirsch, avait amorcé la remise à plat de ces baux légalement résiliables
à la retraite, doublée d’une « chasse aux abus » dans son parc locatif. Entre
les retraités, jamais partis, et les quelque 500 logements « récupérables» aux
locataires illégitimes, les hôpitaux de Paris comptent « retrouver » un millier
de logements supplémentaire d’ici 2019.
Celui de Marie en fera partie, et la sexagénaire ne le
conteste pas, malgré l’épée de Damoclès qui descend chaque jour un peu plus sur
son petit 33 m2. «Quand j’ai signé en 1986, mon bail stipulait bien qu’il s’achèverait
à la retraite, c’est normal après tout. D’ailleurs c’est pour cela que j’ai
anticipé, et fait ma demande de logement social il y a 10 ans »,
raconte-t-elle. Dix ans et toujours aucune proposition. «On m’a dit qu’il était
trop tôt, que j’étais salariée, ensuite que je restais non prioritaire puisque
rien ne semblait changer du côté de l’AP-HP, qui continuait de prélever mon
loyer... » Ce mercredi après-midi, la retraitée sera parmi les « manifestants
», locataires menacés d’expulsion et représentants de la Confédération
nationale du logement (CNL), qui se rassembleront devant le siège de l’avenue
Victoria (Ier), avant d’être reçus au cabinet de Martin Hirsch. Ce qu’ils lui
demanderont ? Pour Marie, qui vit avec 1 200 € par mois, dont plus du tiers part
déjà dans son loyer à l’AP-HP, ce sera simplement «De me laisser mon
appartement tant que je n’ai pas de proposition dans le parc social». Et pour
la plupart des autres, «De permettre aux plus vieux de rester chez eux, même si
leurs revenus dépassent le plafond». « Ces gens sont logés depuis des décennies
à l’AP-HP, ils n’ont aucune alternative dans le privé compte-tenu de leur âge
et de leurs ressources ! », insistent les porte-parole des amicales de
locataires. « L’assistance publique a continué d’encaisser des loyers, et
considère maintenant que ces gens sont occupants sans droit ni titre... Elle
doit tenir compte des situations individuelles et ne pas mettre tout le monde à
la porte ! » insiste de son côté Alex Maudet, juriste à la CNL.
p>C’est précisément ce que s’engage à faire la Direction
générale, où ces soupçons de « chasse aux vieux » soulèvent l’indignation. « Il
n’a jamais été question d’expulser les gens comme cela, au bout des 2 mois de
préavis de non renouvellement du bail !, se défend catégoriquement l’AP-HP.
Pour les baux comportant cette clause de fonction, nous étudions chaque
situation, prenons aussi en compte l’ancienneté du bail etc ». Pour bon nombre
de retraités, la menace d’expulsion se transformera alors probablement en révision
à la hausse de leur loyer, qui passera au prix du marché. « Une bien piètre
reconnaissance de personnes qui ont donné leur temps sans compter pendant des
décennies au service de l’AP-HP », commente avec dépit un responsable
d’amicale.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire